
Date de publication :
25 avril 2023
Auteur(s) :
GAËLLE LECOUËDIC
Accession sociale à la propriété : vos questions… et nos réponses (1ère partie)
En matière d’accession sociale à la propriété, qui peuvent être les accédants, et sous quelles conditions ? Les organismes Hlm peuvent-ils librement définir les modalités de prix de leur logement ? Le cadre juridique entourant l’accession est ici posé.
Les OPH, les SA d’Hlm et les sociétés coopératives Hlm peuvent vendre des logements neufs, conformément à leur compétence en accession sociale à la propriété telle que définie par le Code de la construction et de l’habitation (cf. articles L.421-1 (5°), L.422-2 (6e alinéa) et L.422-3 (2°) du CCH) et permettre ainsi l’accession à la propriété, sécurisée, de personnes sous plafonds de ressources. Sont principalement signés avec les accédants : des contrats de vente, notamment de vente en l’état futur d’achèvement (Vefa) ou de location-accession (PSLA) et, ces dernières années, des baux réels solidaires (BRS).
Les opérations d’accession à la propriété via un bail réel solidaire feront l’objet de publications à venir(1). Dans ce premier volet, les opérations de location-accession (PSLA)(2) seront plus particulièrement présentées, les opérations de vente de logements construits par les organismes et le cadre juridique y afférant : quelles sont les conditions à remplir par les accédants, les organismes Hlm peuvent-ils librement définir les modalités de prix de leurs logement ?
Quelles sont les personnes pouvant acquérir un logement en accession sociale ?
Dans le cadre de leur activité d’accession sociale à la propriété, les organismes Hlm ne peuvent vendre un logement qu’à des personnes physiques : soit qui le destinent à leur occupation personnelle, à titre de résidence principale, soit qui s’engagent à le donner en location dans le cadre des dispositifs fiscaux Loc’Avantages (article 199 tricies du Code général des impôts) ou Pinel (article 199 novovicies du CGI).
Les accédants qui destinent le logement à leur occupation personnelle doivent respecter des plafonds de ressources, contrairement aux “investisseurs” qui doivent le mettre en location, à titre de résidence principale, à des personnes physiques sous plafonds de ressources et de loyers (réglementés pour chacun des deux dispositifs fiscaux sus-visés).
Les textes n’autorisent donc pas un organisme Hlm à vendre un logement neuf à une personne physique qui le donnerait en location “libre” sans plafonds. Il peut être recommandé de mentionner dans l’acte de vente que la personne physique (“investisseur”), ne destinant pas le logement à son occupation personnelle, prend l’engagement de le donner en location, conformément aux dispositions de l’article D.443-34 du CCH.
En outre, la vente de logements neufs construits par l’organisme Hlm devant être consentie à une personne physique, la vente à une société civile immobilière (SCI), y compris une “SCI familiale”, est exclue.
Les organismes Hlm peuvent vendre un logement à des personnes physiques, soit pour leur occupation personnelle, soit pour les mettre en location dans le cadre des dispositifs fiscaux Loc’avantages et Pinel.
Quels sont les plafonds de ressources applicables aux accédants ?
Il résulte de l’article D.443-34 du CCH, complété par l’arrêté du 3 mai 2002(3), que les ménages accédants doivent avoir des ressources qui n’excèdent pas les plafonds “Logement intermédiaire (LI) majorés de 11%”, également dénommés “LI accession”.
Le montant des ressources pris en considération correspond à la somme des revenus fiscaux de référence, de chaque personne composant le ménage, au titre de l’avant-dernière année (N-2) précédant celle de l’acquisition, et justifié par la production de l’avis d’imposition correspondant, lors de la conclusion du contrat de réservation, ou à défaut, lors de la signature de l’acte authentique de vente.
En outre, les sociétés coopératives Hlm, ont pris l’engagement de réserver leurs ventes aux ménages modestes, et plus particulièrement à des personnes physiques dont les ressources sont inférieures aux plafonds des prêts d’accession sociale (PAS) pour au moins 10% de leurs ventes annuelles (cf. le protocole entre la Fédération des coopératives Hlm et l’État du 28 mars 2002).
Dans l’hypothèse de la vente aux “investisseurs”, l’accédant n’est pas soumis au respect de plafonds de ressources, mais il doit s’engager à louer le logement, dans les conditions résultant de l’article D.443-34 du CCH, c’est-à-dire dans les limites résultant de l’application des dispositifs fiscaux précités.
Lors de la réalisation d’un programme dans le cadre d’une opération d’accession sociale à la propriété, existe-t-il une proportion de logements neufs, construits par l’organisme Hlm, pouvant être vendus à des investisseurs ?
Non, il n’existe pas, dans la réglementation relative aux opérations d’accession sociale, de proportion à respecter entre les ventes de logements aux investisseurs et celles consenties à des personnes destinant le logement à leur occupation personnelle à titre de résidence principale. Il appartient à l’organisme Hlm de définir librement sa politique de vente et, le cas échéant, de fixer ses priorités quant aux acquéreurs des logements.
Toutefois, compte tenu de la mission sociale des organismes Hlm, ils ont principalement pour objet de vendre un logement à des personnes le destinant à leur occupation personnelle, à titre de résidence principale. Ainsi, la vente aux investisseurs ne devra pas représenter l’essentiel de l’activité de l’organisme Hlm.
Les organismes Hlm peuvent-il faire de l’accession “libre”, c’est-à-dire sans aucun plafond, notamment en applica- tion des dispositions de l’article L.433-2 du CCH qui visent la cession en Vefa de logements à une personne privée ?
La vente en accession “libre” c'est-à-dire sans aucun plafond (ni de prix ni de ressources) est exclue pour les organismes Hlm. Il résulte des dispositions légales, rappelées supra, que les opérations d’accession sociale réalisées par les organismes doivent respecter “des prix de vente maxima fixés par l’autorité administrative”. Par conséquent, quel que soit l’acquéreur, le prix de vente du logement doit être fixé dans la limite des prix plafonds réglementaires.
Ces plafonds de prix sont fixés hors taxe pour l’ensemble des opérations d’accession sociale à la propriété. Il convient d’y ajouter la TVA applicable selon l’opération (au taux normal ou réduit). Ces plafonds de prix sont révisés, automatiquement, chaque année au 1er janvier, en fonction de la variation annuelle de l’indice du coût de la construction.
Sauf vente aux investisseurs, les accédants doivent respecter des plafonds de ressources fixés par la réglementation, et révisés également chaque année au 1er janvier.
Il n’entre donc pas dans les compétences d’un organisme Hlm, y compris avec des fonds propres, de faire des opérations d’accession à la propriété sans respecter les plafonds réglementaires.
Si un organisme Hlm réalisait des opérations d’accession à la propriété sans plafonds, il pourrait, à l’occasion d’un contrôle de l’Ancols, faire l’objet d’une des sanctions prévues par les articles L.342-11 et suivants du CCH, indépendamment des conséquences fiscales (cf. infra).
Par ailleurs, l’article L.433-2 du CCH prévoit la possibilité pour un organisme Hlm de céder en Vefa, à une personne privée, des logements représentant au plus 30% d’un programme composé majoritairement de logements sociaux.
Or, ces dispositions ne visent pas l’activité d’accession sociale des organismes Hlm et, dans l’esprit du texte, la “personne privée” est une personne morale de droit privé, tel qu’un promoteur privé.
L’idée du législateur (cf. loi Alur du 24 mars 2014) était de permettre à un organisme Hlm ayant la maîtrise du foncier, de céder des logements à une personne morale de droit privé, “à l’inverse” des montages selon lesquels une personne morale de droit privé (un promoteur) a la maîtrise du terrain et cède des logements locatifs sociaux à un organisme Hlm, notamment dans le cadre de servitudes de mixité sociale.
Ce dispositif n'a donc pas pour objet de permettre aux organismes Hlm de réaliser des opérations d’accession à la propriété, sans plafonds (de ressources et de prix).
Les opérations d’accession sociale réalisées par les organismes Hlm font-elles partie du service d’intérêt économique général (SIEG) ?
Oui, dès lors que ces opérations d’accession remplissent les conditions posées par l’article L.411-2 du CCH. Ces opérations doivent, d’une part, être consenties au profit d’accédants sous plafonds de ressources, et, d’autre part, prévoir des garanties de rachat et de relogement, pour répondre à la définition du SIEG résultant du dixième alinéa de l’article L.411-2 du CCH.
Rentrent ainsi dans le SIEG, les opérations destinées à des personnes physiques dont les revenus sont inférieurs aux plafonds PLS majorés de 11% (“PLS accession”) ainsi que, dans la limite de 25% des logements vendus par l’organisme, les opérations destinées à des personnes de revenu intermédiaire dont les ressources dépassent les plafonds PLS + 11% sans excéder les plafonds LI + 11%, lorsque ces opérations sont assorties des garanties de rachat et de relogement.
Les opérations d’accession sociale à la propriété réalisées par les organismes Hlm, et répondant à la définition du service d’intérêt économique général (SIEG) sont exonérées d’impôt sur les sociétés (IS). Les ventes consenties par les organismes Hlm à des personnes physiques, investisseurs, ne rentrent pas dans le SIEG, elles sont donc soumises à l’IS.
Une personne physique propriétaire d’un logement acquis dans le cadre de la vente Hlm peut-elle se porter acquéreur d’un logement neuf en accession sociale auprès d’un organisme Hlm ?
Oui, elle peut en principe acquérir un logement neuf en accession sociale.
Les dispositions particulières applicables lors de la vente d’un logement ancien, appartenant à un organisme Hlm, ne sont pas applicables aux opérations d’accession sociale à la propriété. En effet, dans le cadre de la vente Hlm, l’article L.443-11 (2e alinéa du IV) du CCH interdit la vente d’un logement à une personne physique ayant déjà acquis un logement, notamment auprès d’un organisme Hlm, sauf exceptions prévues par le texte.
Cette condition prévue dans le cadre de la vente Hlm n’est pas applicable aux accédants lors de la vente d’un logement neuf.
Le régime de la vente de logements, en accession sociale, ne prévoit pas un principe similaire à celui prévu pour la vente Hlm : l’accédant peut donc se porter acquéreur d’un logement neuf, construit par un organisme Hlm, quand bien même il serait, ou aurait été, propriétaire d’un logement acquis antérieurement dans le cadre de la vente Hlm.
Cet accédant devra remplir les conditions de l’accession sociale (ressources et affectation du logement) rappelées supra.
Toutefois, d’autres règles, telles que celles applicables au financement du premier logement (notamment en cas d’obligation d’occupation à titre de résidence principale), pourraient faire obstacle à l’acquisition d’un logement en accession sociale par la même personne physique.
Les accédants doivent-il être des primo-accédants ?
Non, les textes relatifs à l’accession sociale n’imposent pas de condition de primo-accession, toutefois la réglementation applicable en cas de recours à certains financements (cf. prêts conventionnés, par exemple le prêt à taux zéro) impose aux accédants de justifier qu’ils n’ont pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux dernières années précédant l’émission de l’offre de prêt.
Quelles sont les spécificités de la vente d’un logement neuf situé en quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) ou en zone Anru ?
Lorsqu’à la date du dépôt de la demande de permis de construire, le logement est situé en zone Anru ou dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV) faisant l’objet d’un contrat de ville (ou est entièrement situé à moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers), le taux réduit de TVA (5,5% en métropole) est applicable aux “livraisons” de logements faisant l’objet d’un contrat d’accession à la propriété.
Le logement doit être destiné à la résidence principale de l’accédant, dont les ressources, à la date de signature de l’avant-contrat (ou du contrat préliminaire) ou, à défaut, à la date du contrat de vente, ne dépassent pas les plafonds PLS majorés de 11% (“PLS accession”).
Le montant des ressources à prendre en considération correspond à la somme des revenus fiscaux de référence (RFR) au sens du 1° du IV de l’article 1417 du CGI figurant sur les avis d’imposition de chaque personne composant le ménage, établis au titre de l’avant-dernière année (N-2) précédant celle de la signature du contrat. Ces modalités d’appréciation des ressources résultent de l’article 4 de l’arrêté du 29 juillet 1987 (relatif aux plafonds de ressources des bénéficiaires de la législation sur les habitations à loyer modéré et des nouvelles aides de l’État en secteur locatif).
C’est donc dans un cadre juridique, certes très encadré, que les OPH, les SA d’Hlm et les sociétés coopératives Hlm peuvent développer leur activité d’accession sociale à la propriété, distincte notamment quant au régime juridique applicable, de celui de la vente de logements anciens (“vente Hlm”), leur permettant ainsi de diversifier leur production de logements, et de réaliser des opérations mixtes comprenant des logements locatifs comme des logements en accession à la propriété.
(1) Lire toutefois AH 1172 du 15 août 2022 : “Bail réel solidaire - La mise en location est-elle possible ?”.
(2) Lire AH 1157 du 15 décembre 2021 et AH 1164 du 15 avril 2022 : “Le PSLA en questions”.
(3) Relatif à la vente de logements dans les opérations d’accession des organismes Hlm.
Thèmes : Conditions de construction et de vente des organismes Hlm - compétences en accession à la propriété.
Contact : Gaëlle Lecouëdic, conseillère juridique, Direction juridique et fiscale de l’USH ; Tél. : 01 40 75 78 60 - Mél. : ush-djef@union-habitat.org
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PARU DANS ACTUALITÉS HABITAT N°1186 DU 17 avril 2023
Actualités Habitat n°1186
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