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Gestion locative : l'évolution des loyers en 8 questions AH

Les lois du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets(1) et du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat(2) contiennent des dispositions relatives à la révision des loyers. Retour en questions/réponses sur les mesures qui impactent le parc locatif social en 2023.

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Les organismes Hlm sont très nombreux à s’interroger sur l’impact de la loi Climat et résilience et de celle relative au pouvoir d’achat concernant la possibilité d’évolution des loyers en 2023. Les communications publiées à ce sujet ne font pas de distinction entre le patrimoine locatif privé et le patrimoine locatif social, créant ainsi des incertitudes sur les décisions à prendre en termes d’évolution de loyers au 1er janvier 2023.

La règle de droit commun d’évolution des loyers

Quelle est la règle applicable aux organismes Hlm en matière d’évolution des loyers pratiqués ?

Les loyers (et redevances des logements-foyers) sont révisés chaque année au 1er janvier, dans la limite de la variation de l’IRL du 2e trimestre de l’année précédente(3).

Depuis la loi du 21 février 2022 dite 3DS(4), le législateur a confirmé la règle selon laquelle les loyers pratiqués des logements Hlm sont révisés chaque année au 1er janvier dans la limite de la variation, et non plus “en fonction” de l’IRL. Dès lors, les bailleurs ont la faculté de fixer l’augmentation de la hausse en deçà de la variation de l’indice à condition de le justifier dans leur délibération. Ils peuvent également moduler l’augmentation de façon différenciée en fonction des segments de patrimoine selon les besoins, sous réserve également d’en justifier dans les délibérations.

Est-il possible d’aller au-delà de cette augmentation légale ?

Les textes prévoient que le préfet peut autoriser l’organisme Hlm à aller au-delà de l’augmentation précitée, pour une durée déterminée, soit dans le cadre d’un plan de redressement approuvé par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), soit pour faire suite à une réhabilitation du patrimoine. Toutefois, d’une année par rapport à la précédente, la hausse de loyer est plafonnée à 5% en sus de la variation de l’indice de référence des loyers, et cette augmentation doit toujours se situer dans la limite du plafond de loyer applicable à l’immeuble et aux logements (“fourchette Hlm” mentionnée au 2e alinéa de l’article L.442-1 du Code de la construction et de l’habitation (CCH), ou plafond de la convention APL). Il est permis d’aller au-delà mais toujours dans la limite du plafond de loyer, en cas d’accord collectif des locataires dans les conditions de l’article 42 de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986.

L’impact de la loi Climat et résilience

L’article 159 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a des incidences sur les mécanismes de réévaluation, de révision et de majoration des loyers des passoires thermiques (patrimoine avec les étiquettes F et G).

 

Seul le parc locatif privé est concerné par l’interdiction de révision des loyers des logements F et G.

 

Le patrimoine locatif social des organismes Hlm est-il concerné par l’interdiction de révision des loyers des logements des classes F et G ?

Non, seul le parc locatif privé est concerné. En effet, la loi modifie notamment l’article 17-1 de la loi du 6 juillet 1989 relatif à la révision (I) et à la majoration (II) de loyer.

Or, la lecture de l’article 40 (I et III) de la loi du 6 juillet 1989 exclut l’application de l’article 17-1 (I et II) aux logements du secteur Hlm. Le III de l’article 17-1 dispose que “la révision et la majoration de loyer prévues aux I et II du présent article ne peuvent pas être appliquées dans les logements de la classe F ou de la classe G, au sens de l'article L.173-1-1 du Code de la construction et de l’habitation.”

Cette nouvelle disposition, entrée en vigueur le 24 août 2022, ne s’applique donc ni aux logements conventionnés, ni aux logements non-conventionnés du parc Hlm dont, pour mémoire, la règle de révision des loyers est fixée aux articles L.353-9-3 et L.442-1 du CCH. Ces articles font bien référence à l’IRL fixé à l’article 17-1 de la loi du 6 juillet 1989 en tant que définition de cet indice, sans pour autant que le régime exposé ne s’applique aux logements locatifs sociaux.

Cette lecture des textes est en totale adéquation avec l’étude d’impact du projet de loi Climat et résilience qui ne vise expressément que le parc locatif privé.

Qu’en est-il des SEM ?

Par le jeu des exclusions de l’article 40 de la loi du 6 juillet 1989 (III et VII), combinée avec la lecture de l’article L.481-2 du CCH, les I et II (et par ricochet le III) de l’article 17-1 de la loi du 6 juillet 1989 ne sont pas applicables aux logements conventionnés des SEM sous réserve qu’elles aient signé une CUS (Convention d’utilité sociale).

L’augmentation des loyers des logements conventionnés des SEM est régie par l’article L.353-9-3 du CCH (comme ceux des organismes d’Hlm).

En revanche, contrairement aux organismes Hlm, les logements non conventionnés des SEM entrent dans le champ d’application de l’interdiction de révision des loyers des logements classés F et G prévue à l’article 17-1 car ces logements relèvent du dispositif de droit commun des logements privés soumis à la loi du 6 juillet 1989.

L’impact de la loi Pouvoir d’achat

Quelle est l’augmentation des loyers maximale possible pour les logements du parc social au 1er janvier 2023 ?

L’article 12 de la loi n°2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat dispose que “pour la fixation des indices de référence des loyers entre le troisième trimestre de l’année 2022 et le deuxième trimestre de l’année 2023, la variation en glissement annuel de l’indice de référence des loyers ne peut excéder 3,5%”.

Ainsi, ce sont les évolutions annuelles de l’IRL constatées du 3e trimestre 2022 au 2e trimestre 2023 qui sont plafonnées à 3,5%. Les évolutions des loyers (et redevances) pratiqués par les organismes Hlm étant basées sur l’IRL du 2e trimestre de l’année précédente (soit pour les évolutions au 1er janvier 2023, l’IRL du 2e trimestre 2022), ils ne sont pas concernés pour les évolutions du 1er janvier à venir qui pourront atteindre 3,6% (sous réserve d’une éventuelle modification issue de la loi de Finances pour 2023 qui ne sera publiée qu’à la fin de l’année).

En revanche, en l’état actuel des textes, les hausses de loyer dans le parc social au 1er janvier 2024 ne pourront dépasser 3,5%.

Le cas des logements-foyers

Les logements-foyers sont-ils concernés par l’interdiction de revaloriser les loyers des immeubles classés F et G ?

La redevance payée par le résident est révisée au 1er janvier de chaque année, dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article L.353-9-3 du Code de la construction et de l’habitation. L’interdiction visée à l’article 17-1 de la loi du 6 juillet 1989 ne s’applique pas (exclusion art. 2 de la loi du 6 juillet 1989).

Concernant la convention de location conclue entre le bailleur social et le gestionnaire, elle relève de la liberté contractuelle. En tout état de cause, l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 exclut l’application de l’article 17-1 aux logements-foyers.

Quels sont les impacts de la loi Pouvoir d’achat sur les logements-foyers ?

Concernant la redevance payée par le résident, au 1er janvier 2023, une augmentation est possible dans la limite de 3,6%, sous réserve d’une éventuelle modification issue de la loi de Finances pour 2023 (3,5% au 1er janvier 2024 en l’état actuel des textes).

Concernant la convention de location organisme Hlm/gestionnaire, l’article 12 de la loi Pouvoir d’achat ne s’applique pas (l’article fixe une liste limitative de son périmètre d’application qui ne vise pas cette convention).

Le cas des baux commerciaux, professionnels et conventions avec associations

Quels sont les impacts de la loi Pouvoir d’achat ?

Les conséquences de la loi Pouvoir d’achat diffèrent selon l’indice de révision des loyers. S’agissant des contrats qui prévoient une revalorisation des loyers sur la base de l’IRL : si la revalorisation contractuelle basée sur l’IRL se réfère à une des dispositions du V de l’article 12 de la loi Pouvoir d’achat(5), il y a lieu de tenir compte du plafonnement de la variation annuelle de l’IRL à 3,5%, entre le 3e trimestre 2022 et le 2e trimestre 2023 pour fixer la révision du loyer suivante à la date anniversaire du contrat (ou éventuellement au 1er janvier en fonction des clauses contractuelles).

S’agissant des contrats (notamment les baux commerciaux) qui prévoient une revalorisation des loyers sur la base de l’Indice des loyers commerciaux (ILC), l’article 14 de la loi relative au pouvoir d’achat dispose que “la variation annuelle de l’indice des loyers commerciaux, publié par l’Insee, prise en compte pour la révision du loyer applicable aux petites et moyennes entreprises, ne peut excéder 3,5% pour les trimestres compris entre le deuxième trimestre 2022 et le premier trimestre 2023. Le plafonnement de la variation annuelle est définitivement acquis et la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision postérieure ne peut prendre en compte la part de variation de l’indice des loyers commerciaux supérieure à 3,5% sur cette même période”. Dès lors, il y a lieu de tenir compte du plafonnement de la variation annuelle de l’lLC à 3,5%, entre le 2e trimestre 2022 et le 1er trimestre 2023 pour fixer la révision du loyer suivant à la date anniversaire du contrat (ou éventuellement au 1er janvier ou à une autre date en fonction des clauses contractuelles) uniquement pour les contrats applicables aux PME qui comportent une clause d’indexation à raison de l’évolution de l’ILC.

Pour précision, les PME sont les entreprises qui emploient moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50M€ ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43M€(6).

S’agissant des contrats (notamment les baux commerciaux) qui prévoient une revalorisation des loyers sur la base d’un autre indice (notamment ILAT ou ICC), la loi Pouvoir d’achat n’a pas modifié les dispositions régissant les autres indices. Dans ces conditions, la revalorisation d’un loyer sur la base d’un autre indice (dont l’ICC ou l’ILAT) n’est pas soumise à un plafond de variation annuelle.

En tout état de cause, la loi de Finances pour 2023 peut toujours techniquement modifier ces différents régimes.

(1) Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
(2) Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.
(3) Articles L. 353-9-3 et L. 442-1 du CCH.
(4) Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale.
(5) 1° Le deuxième alinéa du I de l’article 17-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 ; 2° Les huitième et dernier alinéas de l’article 17-2 de la même loi ; 3° Le deuxième alinéa de l’article L. 411-11 du Code rural et de la pêche maritime ; 4° L’article 7 de la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière ; 5° Les dixième et dernier alinéas du VI de l'article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique ; 6° Le premier alinéa de l’article L. 353-9-2 du Code de la construction et de l’habitation ; 7° Le premier alinéa de l’article L. 353-9-3 du même code ; 8° L’avant-dernier de l’article L. 442-1 dudit code ; 9° Le V de l’article L. 445-3 du même code ; 10° Le deuxième alinéa de l’article L. 445-3-1 du même code.
(6) En application de l’annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité, page 70.

Thèmes : Gestion locative - Loyers.

Contact : Barbara Fourcade, Responsable du département gestion locative - Direction juridique et fiscale. Tél : 01 40 75 78 60 ; Mél : ush-djef@union-habitat.org