L’annonce, le 15 décembre, par le Fonds national des aides à la pierre (Fnap), d’un objectif de programmation pour 2023 de 25 000 logements sociaux en région francilienne a fait l’effet d’une bombe. Dans un Manifeste intitulé Ne renonçons pas à des objectifs ambitieux de production de logement social en Île-de-France, publié le 9 mars, l’Aorif, la Fondation Abbé Pierre (FAP) et l’Association francilienne pour favoriser l’insertion par le logement (Affil) dénoncent “un objectif au rabais” avec une baisse de 24% de la programmation alors que 31 400 logements sociaux avaient été programmés en 2022 dans la Région. L’objectif de 25 000 a été fixé d’après une enquête des préfets sur les projets de construction déjà identifiés ou en gestation. Pour autant, “cette baisse d’objectif ne correspond en rien aux besoins”, s’insurge Damien Vanoverschelde, président de l’Aorif, qui dénonce “une disparition dramatique de la politique publique de production de logements sociaux en Île-de-France”, dans un contexte “très important” de révision, cette année, du Schéma directeur de la Région Île-de-France (Sdrif) et du Schéma régional de l’habitat et de l’hébergement (SRHH).

Une crise du logement qui s’aggrave

Alors qu’1,3 million de personnes sont mal-logées en Île-de-France, dont 140 000 sans domicile, 780 000 ménages sont en attente d’un logement social (32% de la demande nationale), dont 100 000 demandeurs de plus en 5 ans. “Si on ne produit pas plus de logement social, qui est la seule solution pour bon nombre de familles, on va aggraver le nombre de personnes mal-logées”, se désole Eric Constantin. Le directeur de l’agence Île-de-France de la FAP constate déjà que plus de 160 000 ménages franciliens se déclarent hébergés chez des tiers.

“Le problème de l’offre se pose, ajoute Pascal Van Laethem, président de l’Affil, alors que l’État nous demande de trouver des solutions de logement et d’hébergement pour des publics précaires”, que “les structures sont totalement engorgées et que la fluidité des parcours ne peut plus être assurée”. Un État qui, selon lui, manque cruellement d’ambition.

Avec 75 000 attributions de logements sociaux en 2022, seule une demande sur 10 est pourvue. En parallèle, le nombre de logements agréés est en baisse continue, à 21 805 logements en 2022, contre 22 259 en 2021. Près de 30 000 logements sociaux étaient produits entre 2013 et 2019, et jusqu’à 36 000 logements agréés en 2016, année où le SRHH et le Sdrif énonçaient des objectifs de 32 000 à 37 000 logements sociaux chaque année pour atteindre un parc social équivalent à 30% des résidences principales à l’horizon 2030.

Les trois signataires du Manifeste appellent les pouvoirs publics à “prendre la mesure de la crise du logement et de l’hébergement” et demandent une augmentation des moyens et des leviers d’actions. “Les schémas régionaux doivent réaffirmer un objectif annuel ambitieux de production (entre 32 000 et 37 000 logements sociaux). Ensemble, les organismes franciliens de logement social et les acteurs du logement et de l’hébergement en Île-de-France sont volontaires pour faire plus”, annoncent-ils, ce qui implique “un accès prioritaire aux gisements fonciers et bâtis et une réelle politique foncière”, ainsi qu’un “soutien financier digne”.