Le ton était plutôt à l’optimisme, lors de la 2^e journée organisée par la Fédération des OPH le 30 mars, à Paris, sur les Sociétés de coordination (lire AH 1167). La dimension projet des SAC a été mise en avant. Au Point Commun, regroupant les trois Offices lyonnais (Est Métropole Habitat, GrandLyon Habitat et Lyon Métropole Habitat), “nous avons fait émerger, en interrogeant les collaborateurs, les thématiques les plus enthousiasmantes”, indique Céline Reynaud, DG de la SAC et d’Est Métropole Habitat. N’étant pas contraints par la loi Élan, “nous avons pu prendre le temps de réfléchir à ce que l’on pourrait faire d’intéressant en commun”. “Avant même les compétences obligatoires, notre objectif est de donner à voir des actions concrètes, en interne comme à l’externe, et notamment auprès des collectivités”, poursuit-elle. Ainsi, des groupes de travail incluant des salariés de chaque Office se sont structurés, autour de 6 thématiques : les stratégies digitales et numériques ; les stratégies d’innovation sociale ; les parcours de formation ; les expertises rares ; les résidences spécialisées ; le syndic. D’ores-et-déjà, des projets ont été lancés sur la cybersécurité, sur les parcours de formation à mutualiser, ou encore sur la comptabilité. La création de la SAC, qui attend son agrément dans les jours à venir, “impulse une dynamique différente, y compris sur les sujets hors regroupement : nous avions déjà des habitudes de travail en commun, mais désormais chaque semaine, nous posons les sujets d’actualité”, complète Céline Reynaud, donnant l’exemple des élections de locataires, “pour lesquelles nous avons élaboré des messages communs, ou encore le fonds de prévention des impayés que nous avons monté ensemble”.

Donner de la consistance

Sur la côte ouest, la SAC Uniter (Habitat 44, Silène et Atlantique Habitations) a elle aussi fait le choix de “sonder les salariés lors de la création pour savoir sur quels sujets ils souhaitaient travailler ensemble”, indique Juliette Lecossier, déléguée générale de la société de coordination. En matière d’innovation sociale, “nous partageons sur les actions envisagées pour savoir si un organisme y va tout seul, ou si on se lance à 2 ou à 3”, illustre-t-elle. Un projet stratégique de gestion des données patrimoniales a également été lancé. Marc-Antoine Élie, mis à disposition de la SAC à 30% de son temps de travail pour l’animer, explique : “Nous avons des besoins communs. Ce projet nous permettra d’avoir un regard sur la fiabilité, l’accessibilité et l’interopérabilité des données”. Chaque bailleur conserverait son propre outil de gestion des données, et la SAC apporterait une structure commune qui les engloberait et leur permettrait d’interagir. La société de coordination a également mis en œuvre le Campus Uniter, un parcours de formation commun pour l’ensemble des managers. Dans le Pays basque, pour une opération de création de 5 logements en BRS, à Saint-Jean-Pied-de-Port, “on a fait le choix d’apporter une solution commune pour porter un message fort et donner de la consistance à la SAC”, souligne pour sa part Lausséni Sangaré, DG de la SAC Habitat Pays Basque Adour Béarn (HPBAB, réunissant l’Office 64 et Habitat Sud Atlantic) et DG d’HSA. Les deux organismes se partagent les tâches : l’Office 64 acquiert en tant qu’OFS l’ancien presbytère à transformer et signe un bail opérateur ; de son côté, HSA réhabilite le bâtiment et le transforme en 5 logements puis vend les droits réels. D’ailleurs, Lausséni Sangaré en profite pour alerter sur le fait qu’“un OFS externe peut acheter en Vefa, contrairement aux OLS agréés OFS (dits OFS internes) qui ne peuvent donc pas utiliser les recettes issues de la vente en BRS pour alimenter leurs autres activités”.

Trouver la bonne échelle

À la création d’Idelians, “on a parlé de projet, et non pas de gouvernance : ça a rassuré les plus petits”, témoigne Christophe Bérion, DG d’Orvitis - le plus gros OPH de la SAC, non soumis à l’obligation de regroupement - et animateur du réseau national des sociétés de coordination. Avec des membres de tailles hétérogènes, le choix a été fait de confier la présidence du directoire de la SAC au DG de Grand Dole Habitat, plus petit des Offices membres (les 3 autres étant Chaumont Habitat, Domanys et Hamaris). “Les valeurs que nous portons en tant qu’OPH et la continuité territoriale, avec des enjeux proches, sont pour nous essentielles”, poursuit-il. Dans son rôle de président de la Fédération des OPH, Marcel Rogemont défend lui aussi l’ancrage dans le local : “Nous avons une capacité à nourrir une politique locale. Un regroupement doit avoir du sens, et répondre à des problèmes communs. C’est d’abord la subsidiarité qui est recherchée”. Mais au-delà du projet, il défend “la confiance”, ce qui impose selon lui de “rester à taille humaine”.

Pourtant, des regroupements nationaux existent. Habitat Réuni rassemble, sur le mode coopératif, 36 organismes Hlm issus de toutes les familles, et présents dans dix régions, mais “nous sommes vigilants à ce que les acteurs viennent conforter des pôles territoriaux et apportent des synergies locales”, souligne Julien Paul, DG de la société de coordination qui a pris la suite du réseau d’organismes existant depuis 2011. Chez Habitat Réuni, “les membres sont là par choix. Plus de la moitié ne sont pas tenus par la loi Élan”. Le DG défend la vision d’un “groupe coopératif décentralisé” capable d’apporter des réponses aux échelons local, régional ou national. Dans le rapport aux élus, c’est le local qui s’impose. Au national sont traitées les logiques grands comptes ou d’achat par exemple. “On a négocié un contrat de santé prévoyance pour tous les salariés du groupe”, se félicite Julien Paul. “La clé d’arbitrage, c’est de savoir à quelle échelle on trouvera la plus grande efficience”.

Souplesse, agilité et liberté

Et en effet, “la notion de SAC fait preuve d’une grande plasticité, d’une grande adaptabilité aux desiderata de ses membres”, constate Marcel Rogemont. François Rieu, directeur général délégué d’Habitat en Région, qui a créé trois SAC en territoires, confirme : “On a un modèle à la fois très centralisé, et avec beaucoup de liberté de manœuvre pour les entités locales”. Selon lui, les SAC, qui n’ont que deux ans d’antériorité, sont “un super outil qui permet de travailler en collectif et de tester des choses avec davantage de moyens”. Et des moyens, il en faudra face aux défis à venir. Pour Julien Paul, “on manque tous de compétences, et c’est normal, face au changement climatique. On a besoin de l’intelligence collective pour franchir avec le moins de casse possible les transformations sociales et sociétales qui s’annoncent. J’en ai l’intime conviction : personne ne sera assez gros pour faire face, seul, aux enjeux de compétences et d’investissements nécessaires”.

“Je ne sais pas si les SAC sauveront le monde, mais peut être qu’elles contribueront à sauver le modèle français du logement social”, veut croire pour sa part Laurent Goyard. En clôture de la journée, le directeur général de la Fédération des OPH insistait sur “la souplesse, l’agilité et la liberté” données par les sociétés de coordination.