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Thème de la publication
Politique du logement & Mouvement HlmNuméro
Actualités Habitat n°1187
Paru dans
Date de publication :
30 avril 2023
Auteur(s) :
VALÉRIE LIQUET
Politique nationale du logement : Emmanuelle Cosse appelle au "sursaut"
Lors d’un point presse organisé par l’USH le 18 avril, sa présidente Emmanuelle Cosse a exprimé son impatience devant les “tergiversations” du gouvernement en matière de politique du logement. “Il doit agir, nous voulons avancer”, a-t-elle déclaré. Une prise de positions largement reprise dans les médias.
“Les bailleurs sociaux demandent au gouvernement d’arrêter de tergiverser” (AFP(1)) ; “Production, réhabilitation : les bailleurs sociaux au pied du mur” (Le Moniteur) ; “Le monde Hlm attend un sursaut” (La Gazette des communes) ; ““Le gouvernement doit arrêter de tergiverser, il doit agir” selon la présidente de l’USH” (AEF Info) ; “Nous appelons à un sursaut du gouvernement (Emmanuelle Cosse)” (News Tank Cities) ; “Nous n’avons aucune visibilité sur l’action du gouvernement (Emmanuelle Cosse)” (Batiactu) ; “Les bailleurs sociaux exigent que le gouvernement résolve la crise du logement” (BFMTV) ; “Logement social : 10 000 demandeurs de plus en un an” (Les Échos), “Logement social : la demande explose alors que la construction est à l’arrêt” (Capital)… La presse spécialisée et généraliste a rapporté le “ras-le-bol” exprimé par la présidente de l’USH lors d’une conférence organisée le 18 avril.
“En l’état actuel, compte tenu de l’inflation, du poids de la dette, des prélèvements sur les organismes Hlm, nous avons la volonté, mais nous n’avons pas les moyens”, a confié Emmanuelle Cosse aux journalistes, appelant effectivement à “un sursaut” du gouvernement qui “doit regarder la vérité en face”.
Côté production, “il faudrait construire 150 000 logements sociaux par an, quand nous peinons à en programmer 95000”, se désole Emmanuelle Cosse.
Côté réhabilitation, pour amener le patrimoine social à la neutralité carbone à 2050, le secteur Hlm doit suivre une trajectoire composée de deux jalons : l’objectif français d’éradication de l’ensemble des logements classés E, F et G d’ici 10 ans ; l’objectif européen Fit for 55, soit une réduction de 61% des émissions directes par rapport à 2019. Pour y parvenir, il faudrait, selon le scénario établi par l’USH, passer au plus vite à un rythme de réhabilitation de 152 000 logements rénovés par an, là où le rythme moyen actuel sur la période 2018-2022 est de 93 000 logements. Et comme il ne s’agit pas de réaliser des petits travaux, qu’il faudrait refaire ou compléter dans 10 ans pour atteindre les étiquettes A et B, les coûts sont élevés. Le besoin de financement est de l’ordre de 250 Md€ à 2050, soit 8,6 Md€ par an.
Cinq chocs percutent le modèle
Le « sursaut » doit intervenir au plus vite, parce qu’il y a urgence environnementale et sociale, et que le modèle Hlm ne peut y faire face seul, alors qu’il se prend lui-même de plein fouet cinq chocs financiers.
Premier choc : la hausse historique du taux du Livret A, passé en quelques mois de 0,5 à 3% : “sur deux ans, c’est un choc d’intérêts d’environ 6 Md€ qui assomme le secteur”, rappelle la présidente de l’USH. Conséquence directe et second choc : celui de l’alourdissement du poids de la dette des organismes Hlm, avec un encours de 170 Md€ en 2023 contre un peu plus de 80 Md€ en 2006. L’inflation est à la fois un choc pour les locataires du parc Hlm et pour les organismes qui, comme tous les acteurs du bâtiment, subissent la hausse des coûts des matières premières, des travaux, du foncier, de la maintenance. Enfin, l’évolution des loyers (qui représentent en moyenne 54% du panier de ressources d’un organisme), plafonnée à 3,5%, ne permet pas de suivre l’inflation.
Dès lors, pour relever les défis de la construction Hlm et de la rénovation du parc existant, le recours à la dette - ou à l’allongement de la dette - ne suffira plus. Il constituerait même un “danger”, selon l’USH.
D’autant que les 5 chocs identifiés ne font que fragiliser une situation déjà intenable… et déjà largement connue. “ll y a eu le Grand débat, la commission Rebsamen, les propositions dans le cadre des présidentielles, le CNR Logement… cela fait un moment que l’on partage les constats”, s’est agacée Emmanuelle Cosse, avant de lister : la baisse de la construction de logements, leur coût inaccessible pour la plupart des Français, la colère sociale qui pointe, les conséquences pour l’emploi. “Nous passons de réunions en réunions, sans cadre, sans vision prospective”, s’est-elle inquiétée auprès des journalistes, alors que le projet de loi de Finances se prépare et que des décisions se profilent pour une nouvelle hausse du taux du Livret A cet été (on parle de 4%, voire 4,5%). Quant au Pacte de confiance voulu en juillet dernier par la Première ministre, il est au point mort dans la mesure où le ministre du Logement, Olivier Klein, n’a pas mandat pour aborder la question financière. Quel que soit le véhicule de décisions, “le gouvernement ne peut plus tergiverser, il doit agir, maintenant”.
Hasard de calendrier ou réactivité salutaire, quelques heures après la conférence de presse de l’USH, Matignon annonçait, une “réunion de ministres sur le logement” à l’agenda d’Élisabeth Borne deux jours après(2). Selon nos informations, il s’agirait d’une “réunion de travail où il sera question de construction et de financement” avec le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires, Grabriel Attal, ministre délégué aux Comptes publics, et Olivier Klein, ministre délégué à la Ville et au logement.
(1) Dépêche reprise par Boursorama, Businessimmo, Batiweb, Batinfo…
(2) Le 20 avril, jour de notre bouclage.
Pour en savoir plus : Contribution de l'Union sociale pour l'habitat au CNR "Logement"
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PARU DANS ACTUALITÉS HABITAT N°1187 DU 30 avril 2023
Actualités Habitat n°1187
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