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Thème de la publication
Politique du logement & Mouvement Hlm
Numéro

Actualités Habitat n°1077

Paru dans

AVRIL 2018

Actualités Habitat n°1077

Date de publication :

30 avril 2018

Interview du président de l'USH sur le protocole signé entre le Mouvement Hlm et l'État

Le 4 avril dernier, l’USH et quatre Fédérations signaient un protocole d’accompagnement avec l’État(1) qui prend acte des évolutions, introduites par le vote de la loi de Finances 2018, impactant fortement l’ensemble des organismes du secteur et nécessitant que le Mouvement Hlm continue d’être un interlocuteur puissant pour pouvoir peser sur sa mise en œuvre. Retour sur les tenants et aboutissants de cet accord.

Actualités Habitat. Pourquoi avoir signé ce protocole ?

Jean-Louis Dumont. Les ministres en charge du dossier étaient soucieux de rétablir le dialogue avec le Mouvement Hlm. Nous en avons discuté avec les présidentes et présidents de Fédérations, dans le cadre de nos instances, et la décision d’accepter ou de refuser le principe de ce protocole a été soumise au vote lors du Comité exécutif du 28 mars dernier. Un membre du Comité exécutif, Stéphane Peu, a voté contre, pour des raisons qu’il a pu exprimer et que je respecte profondément.

Il faut bien comprendre que le rôle de l’USH est d’accompagner une politique publique, tout en défendant les intérêts des organismes Hlm et des locataires. Je vais le dire très simplement : la loi de Finances 2018 est un mauvais coup pour le logement social. Personne n’en mesure aujourd’hui les effets. Mais elle a été votée par le Parlement, confirmée par le Conseil constitutionnel ; il n’y a pas d’autre option que de l’appliquer, tout en veillant à en limiter les effets les plus nocifs.

C’est ce à quoi nous nous employons aujourd’hui, et je peux vous dire que les efforts des équipes de l’USH et des Fédérations, en responsabilité, ont d’ores et déjà permis de limiter le montant de la facture qui, si on n’y avait pas pris garde, se serait élevée non pas à 800 millions d’euros, mais à 1 milliard d’euros dès 2018, à cause des effets de « débord » de la réduction de loyer de solidarité (RLS) par rapport aux baisses d’APL.

Peut-on revenir sur le contenu de cet accord que la Fédération des Offices n’a pas signé ?

Ce protocole contient des avancées notables en termes de représentation de l’USH et des Fédérations, notamment à l’Anru. Il stabilise des dispositions importantes, dont plusieurs étaient inscrites dans le Livre blanc telles celles sur la maîtrise d’ouvrage et les financements accompagnant les expérimentations en matière de transition énergétique et les démolitions en zones détendues. Il nous permet, par ailleurs, d’obtenir des clarifications et des précisions sur des modalités de mise en œuvre, notamment sur le passage aux contingents en flux, sur la cotation de la demande, qu’il faut entendre comme une aide à la décision, ouverte à des critères locaux. Il définit les conditions dans lesquelles les organismes participeront au doublement des crédits de l’Anru (étant entendu que le passage à 10 milliards avec une contribution supplémentaire d’Action Logement et de la CGLLS a été voté dans la loi de Finances) : le protocole stabilise une contribution « lissée » dans le temps, qui démarrera en 2019 et ouvre la discussion dans le cadre des conclusions de la « mission Borloo » autour d’un renforcement du Mouvement Hlm dans la gouvernance de l’Anru. Il garantit la reconduction de l’appel à projets Logements accompagnés et la programmation de 40 000 PLAI…

Ce protocole ne valide évidemment pas la RLS mais il permet d’organiser son accompagnement et son évaluation.

Par ailleurs, sur la vente, si l’État a tenu à afficher un objectif de 40 000 ventes par an, le Mouvement Hlm, conformément à sa position constante, a pris l’engagement de continuer à accompagner les organismes dans la professionnalisation des métiers liés à la vente, aux syndics. Ces objectifs ne doivent pas limiter le développement de l’accession sociale sécurisée dont l’enjeu a été rappelé. Enfin sur le tissu des organismes, les seuils fixés dans la loi nécessitent des précisions, telle la prise en compte des collectivités délégataires des aides à la pierre ; des amendements seront proposés sur les compétences, les modalités. Toutefois, les seuils ne sont aujourd’hui contestés par aucune Fédération et l’USH a, dès le début, fait savoir, dans le Livre blanc que la recherche du consensus entre l’État et l’ensemble des familles Hlm serait sa seule ligne de conduite.

Alain Cacheux, président de la Fédération des OPH, a souhaité renvoyer ce débat au Conseil fédéral qui se tiendra fin avril. C’est tout à fait légitime.

Certains organismes se sont émus de la signature de ce protocole, alors même que le combat contre la loi de Finances est encore dans toutes les mémoires et que la loi ÉLAN n’est pas encore votée.

Le rôle de la Confédération, dans le contexte que nous connaissons aujourd’hui, est de faire en sorte que l’application des dispositions votées par le Parlement, dans le cadre de la loi de Finances 2018, se fasse en préservant au mieux les intérêts des organismes, dans un dialogue renouvelé avec l’État. J’ai toujours prôné le dialogue – c’est ma conception du rôle de l’Union sociale pour l’habitat – aussi et surtout quand une mesure aussi injuste nous est imposée et que nous faisons face à l’adversité.

Je voudrais aussi revenir sur un point qui n’est pas forcément dans l’esprit de chacun : la loi qui a été votée est claire, il est de la responsabilité des organismes Hlm de mettre en œuvre la RLS même si, je le dis et je le répète, c’est une mauvaise mesure, qui n’a, à ce jour, pas fait l’objet d’étude d’impact. Nous devons vivre et travailler avec ce paradoxe.

Dès lors, le protocole signé avec l’État ne valide évidemment pas la RLS, mais il permet d’organiser son accompagnement et son évaluation, en revenant sur un certain nombre de chantiers qui doivent être menés à bien dans les prochains mois : les mesures d’accompagnement, le comité de suivi, la commission de péréquation, l’évaluation des conséquences de la mesure.

Mais pourquoi signer un protocole avant le débat parlementaire sur la loi ÉLAN ?

Nous avons eu l’occasion de le faire savoir publiquement, la loi ÉLAN, dans la partie consacrée au logement social, contient des mesures intéressantes, que pour certaines nous avons largement promues. Le fait de signer un protocole avant le débat parlementaire nous permet d’acter ces avancées. Je gage que le gouvernement saura résister, avec sa majorité, aux tentatives de pression, et je pense là notamment aux mesures de simplification. J’y reviendrai.

Cela ne veut pas dire que nous obérons notre capacité d’amendements, qu’il s’agisse de l’USH ou des Fédérations ; nous avons déjà toute une série d’amendements à proposer sur ce texte. Par ailleurs, un point n’est pas suffisamment développé dans le texte, c’est la question des loyers. Les ministres se déclarent favorables à ce que ce point ne soit pas réglé par ordonnance mais dans le cadre du débat parlementaire. C’est au moins la garantie d’un débat sur la question.

Le rôle de la Confédération est de faire en sorte que l’application des dispositions, votées dans le cadre de la loi de Finances, se fasse en préservant au mieux les intérêts des organismes et des locataires.

Un mot sur les architectes qui s’opposent à plusieurs dispositions du texte de loi ?

Je ne sais pas si les architectes s’y opposent, mais je constate que leurs organisations professionnelles s’émeuvent, et qu’elles ne rechignent pas à s’exonérer de nuances. Elles sont sans doute dans leur rôle, mais cela ne les autorise pas à tordre la réalité des faits et des textes. Ce que le texte prévoit, c’est simplement le rétablissement de règles égales entre promotion privée et publique. Je rappellerai qu’il y a encore six mois, le concours d’architecture n’était pas obligatoire et, que la qualité architecturale, dans le logement social, n’était pas contestée. Par ailleurs, il n’est pas question pour les organismes Hlm de construire et de rénover sans recourir aux compétences des architectes. Quant à agiter le chiffon rouge d’une régression architecturale dans le logement social, la loi nous renvoyant aux catastrophes des années 60 et 70, je note avec une pointe d’ironie que les architectes usent maintenant de leurs droits d’inventaire. Plus sérieusement, on est dans la pure caricature. Opposer architecture et logement social, pour qui connaît un minimum l’histoire de nos liens, cela n’a tout simplement aucun sens.

(1) Lire Actualités Habitat n° 1076 du 15 avril page 4.
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PARU DANS ACTUALITÉS HABITAT N°1077 DU 30 avril 2018

Actualités Habitat n°1077

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